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Marc GOZLAN

Je suis médecin de formation, journaliste par vocation. J’ai débuté ma carrière de journaliste médico-scientifique en agence de presse…  Lire la suite.

Les boissons sucrées associées à un risque accru de mortalité chez les diabétiques de type 2

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SOMMAIRE

La consommation de boissons sucrées augmente le risque de mortalité chez les patients vivant avec un diabète de type 2, conclut une vaste étude épidémiologique menée par des chercheurs des départements de nutrition, d’épidémiologie et de médecine de la Harvard TH Chan School of Public Health.

Il ressort de cette étude, publiée le 19 avril 2023 dans le British Medical Journal (BMJ), que le remplacement de boissons riches en calories par d’autres faiblement énergétiques réduit la mortalité dans cette même population de patients diabétiques.

Une étude sur un large effectif avec un suivi très long

Cette étude a inclus des participants appartenant à deux cohortes prospectives américaines conduites auprès de professionnels de santé : la Nurses’ Health Study et la Health Professionals Follow-Up Study. L’effectif comprenait 11 399 participants de la première cohorte et 4 087 appartenant à la seconde cohorte. Le suivi de ces 15 486 participants a duré en moyenne 18,5 ans. Leur diabète a été diagnostiqué au cours d’une période très longue, qui a débuté dans les années 1980.

Les chercheurs ont analysé la consommation de boissons de ces hommes et femmes atteints de diabète de type 2 (DT2) et déterminé la relation avec la mortalité toutes causes confondues et avec le risque de présenter une maladie cardiovasculaire (maladie coronarienne, accident vasculaire cérébral) ou un décès d’origine cardiovasculaire. Ils ont également estimé l’effet sur ces paramètres pronostiques du remplacement d’une boisson sucrée par une autre, peu ou pas calorique. Une évaluation alimentaire détaillée a été conduite avant et après le diagnostic de diabète, tous les deux à quatre ans.

Le Ma, Qi Sun et leurs collègues de Harvard ont demandé aux participants diabétiques de type 2 d’indiquer à quelle fréquence (entre 0 et 6 fois par jour) ils consommaient des boissons sucrées (sodas caféinés ou non-caféinés, limonades), des boissons artificiellement sucrées (sodas faiblement caloriques, caféinés ou non), des jus de fruits (orange, pomme, pamplemousse, ou autre), du café (caféiné ou non), du thé, du lait écrémé ou de l’eau plate. Le niveau de consommation des différentes boisons a été classé en cinq catégories.

Des données en population générale, mais quasiment rien concernant les patients DT2

Ces dernières années, de nombreuses études de cohortes prospectives et plusieurs méta-analyses de ces mêmes études ont montré qu’une forte consommation de boissons peu caloriques, tels que de l’eau plate, du lait écrémé, du café, était clairement associé, dans la population générale, à une moindre incidence d’obésité, de diabète de type 2, de maladie cardiovasculaire, ainsi qu’à une moindre mortalité toutes causes confondues.

À l’inverse, la consommation de boissons sucrées était associée à un risque plus élevé de survenue d’un diabète de type 2 et de maladie cardiovasculaire. Toujours dans la population générale, plusieurs études de cohortes prospectives ont montré que les boissons édulcorées en remplacement des boissons sucrées peuvent augmenter le risque d’obésité. Une étude (EPIC-InterAct Study) a par ailleurs montré que le remplacement des boissons sucrées par du café ou du thé (250 g/jour) était associé, dans huit populations européennes différentes, à une moindre incidence de diabète de type 2 (respectivement de – 21 % et – 22 %).

En revanche, on dispose à ce jour de peu de données sur l’association d’une consommation de boissons sucrées et le risque de maladie cardiovasculaire et mortalité dans la population des adultes diabétiques de type 2. C’est justement l’objet de l’étude publiée dans le BMJ par les chercheurs de l’école de santé publique de Harvard (TH Chan School of Public Health).

Une forte consommation de boissons sucrées est associée à une mortalité toutes causes confondues plus importante

Après ajustement sur plusieurs variables, il ressort que la mortalité toutes causes confondues était en moyenne 20 % supérieure chez les participants qui consommaient le plus de boissons sucrées par rapport à ceux qui en consommaient le moins.

À l’inverse, la mortalité était moindre chez les participants qui consommaient beaucoup de café, de thé, d’eau plate et de lait écrémé.

Il est à noter que les chercheurs n’ont pas établi de relation claire entre la mortalité et la consommation d’autres boissons, telles que les boissons artificiellement sucrées, les jus de fruits ou le lait entier.

Une forte consommation de boissons sucrées est associée à une incidence plus élevée de maladie cardiovasculaire

Les auteurs ont observé des résultats similaires concernant la mortalité d’origine cardiovasculaire, celle-ci étant plus élevée chez les participants qui consommaient régulièrement des boissons sucrées.

Le risque de mortalité toutes causes confondues diminuait, de façon non linéaire, avec la quantité consommée de café, de thé, d’eau plate ou de lait écrémé. À l’inverse, l’association entre la consommation de boissons sucrées et la mortalité toutes causes confondues augmentait de façon plus linéaire.

Il s’avère que, chez les patients DT2, chaque portion quotidienne supplémentaire d’une boisson sucrée était liée en moyenne à une augmentation de 8 % en termes de mortalité toutes causes confondues.

L’étude montre par ailleurs qu’une forte consommation de boissons sucrées était significativement associée à un risque plus élevé de maladie cardiovasculaire, en moyenne de 25 % entre la consommation la plus importante et celle la plus faible en boissons sucrées*. Au contraire, l’augmentation de consommation de café et de lait écrémé était inversement associée à l’incidence de maladie cardiovasculaire**.

L’augmentation de consommation de café, entre la période précédant le diagnostic de diabète et la suivante, a été significativement associée à un moindre risque de mortalité toutes causes confondues. De même, par rapport aux participants qui n’avaient pas modifié leur consommation de café, ceux qui en buvaient plus après le diagnostic de diabète ont présenté une moindre mortalité toutes causes confondues (diminution de 18 % du risque de décès). Un résultat similaire a été observé avec la consommation de thé ou de lait écrémé.

Remplacer les boissons sucrées ou édulcorées par du café, du thé, de l’eau plate ou du lait écrémé est associé à une moindre mortalité cardiovasculaire

Le remplacement d’une portion quotidienne d’une boisson sucrée par du café a été associé à un risque de mortalité toutes causes confondues réduit de 18 %. La réduction de ce même risque de décès était de 16 % concernant la consommation de thé et d’eau plate, de 12 % pour le lait écrémé.

Le remplacement des boissons sucrées par du café, du thé, de l’eau plate ou du lait écrémé a été associé à une baisse de la mortalité d’origine cardiovasculaire de respectivement 20 %, 24 %, 20 % et 19%.

Le remplacement d’une portion quotidienne d’une boisson sucrée par une boisson artificiellement sucrée a été significativement associée à une réduction de 8 % de la mortalité cardiovasculaire et de 15 % de l’incidence de maladie cardiovasculaire***.

Enfin, le remplacement d’une portion quotidienne d’une boisson artificiellement sucrée par du café, du thé ou de l’eau plate a également été associé à une moindre mortalité toutes causes confondues.

Ces résultats semblent robustes dans la mesure où les associations entre les consommations de boissons et le risque cardiovasculaire et la mortalité restaient inchangés après exclusion des participants qui présentaient un diabète en début d’étude, ou lorsque l’on excluait de l’analyse les décès survenus durant les quatre premières années de suivi après le diagnostic de diabète. De même, les estimations demeuraient similaires après ajustement sur le statut socio-économique des participants.

Plusieurs mécanismes biologiques peuvent expliquer les associations observées chez les adultes diabétiques entre certains types de boissons et la mortalité toutes causes confondues et l’incidence de maladie cardiovasculaire. Selon les auteurs, le sirop de maïs à haute teneur en fructose et le saccharose ajoutés dans les boissons sucrées peuvent entraîner une prise de poids, une résistance à l’insuline et une inflammation. Par ailleurs, le pic de glycémie et des concentrations d’insuline observésfgain après la consommation de boissons sucrées peut potentiellement entraîner une résistance à l’insuline au fil du temps, ce qui est particulièrement néfaste pour les adultes atteints de diabète. De plus, les calories contenues sous forme de liquide dans les boissons sucrées peuvent diminuer la sensation de satiété.

À l’inverse, le café contient plusieurs composés bioactifs protecteurs, tels que l’acide chlorogénique, des mélanoïdines et la trigonelline, qui peuvent réduire le stress oxydatif et l’inflammation. Quant au thé, il constitue une source de polyphénols, spécialement de catéchines, qui possèdent des propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires.

Les résultats de cette étude, réunissant un grand nombre de participants inclus dans deux grandes études prospectives, « apportent des preuves supplémentaires soulignant l’importance du choix des boissons dans le maintien de la santé globale chez les adultes atteints de diabète », concluent les auteurs. Ils devraient inciter les soignants à conseiller à leurs patients DT2 consommateurs réguliers de boissons sucrées de changer leurs habitudes et opter pour des boissons plus saines, à condition évidemment de ne pas ajouter de sucre dans le café ou dans le thé et transformer ces breuvages en boissons sucrées.

Marc Gozlan (Suivez-moi sur TwitterFacebookLinkedInMastodon)

* HR (hazard ratio) = 8 %. Intervalle de confiance 95 % (IC 95%) entre 2 % et 14 %.

** Pour le café, HR (hazard ratio) = 0,82 (IC 95 % entre 0,69 et 0,98). Pour le lait écrémé, HR = 0,88 (IC 95 % entre 0,78 et 1,00).

*** Réduction de 8% de la mortalité cardiovasculaire (IC 95 % entre 1 % et 14 %). Réduction de 15 % de maladie cardiovasculaire (IC95 % entre 4 % et 24 %).

 

Pour en savoir plus...

Ma L, Hu Y, Alperet DJ, Liu G, Malik V, Manson JE, Rimm EB, Hu FB, Sun Q. Beverage consumption and mortality among adults with type 2 diabetes: prospective cohort study. BMJ. 2023 Apr 19;381:e073406. doi: 10.1136/bmj-2022-073406

Li B, Yan N, Jiang H, Cui M, et al. Consumption of sugar sweetened beverages, artificially sweetened beverages and fruit juices and risk of type 2 diabetes, hypertension, cardiovascular disease, and mortality: A meta-analysis. Front Nutr. 2023 Mar 15;10:1019534. doi: 10.3389/fnut.2023.1019534

Naomi ND, Brouwer-Brolsma EM, Buso MEC, et al. Association of sweetened beverages consumption with all-cause mortality risk among Dutch adults: the Lifelines Cohort Study (the SWEET project). Eur J Nutr. 2023 Mar;62(2):797-806. doi: 10.1007/s00394-022-03023-6

Pacheco LS, Lacey JV Jr, Martinez ME, et al. Association Between Sugar-Sweetened Beverage Intake and Mortality Risk in Women: The California Teachers Study. J Acad Nutr Diet. 2022 Feb;122(2):320-333.e6. doi: 10.1016/j.jand.2021.08.099

Pan B, Ge L, Lai H, Wang Q, et al. Association of soft drink and 100% fruit juice consumption with all-cause mortality, cardiovascular diseases mortality, and cancer mortality: A systematic review and dose-response meta-analysis of prospective cohort studies. Crit Rev Food Sci Nutr. 2022;62(32):8908-8919. doi: 10.1080/10408398.2021.1937040

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